Point dette - 15/04/2021
Un équilibre fragile
La perspective d’une reprise économique vigoureuse, en particulier aux Etats-Unis, une liquidité abondante et des Banques centrales (BCE, Fed) rappelant régulièrement qu’elles demeureront durablement accommodantes dessinent un paysage favorable aux actifs risqués dans lequel les indices phares américain S&P 500 et européen Stoxx 600 viennent d’inscrire des plus hauts historiques. En parallèle, après avoir nettement progressé en début d’année, les rendements obligataires souverains se sont stabilisés depuis début mars. Le taux à 10 ans américain évolue autour de 1,70% (+78 points de base depuis le 1er janvier), tandis qu’en Europe le Bund allemand et l’OAT française de même échéance se négocient respectivement autour de -0,30% (+27 pb) et -0,05% (+30 pb).
Toutefois, cette combinaison pose de nombreuses questions, avec la menace d’une explosion de la dette publique, d’un regain d’inflation et de la hausse de l’imposition sur les entreprises a minimia aux Etats-Unis. Les marchés se focaliseront dans les prochains mois sur les chiffres d’inflation qui seront le principal « market mover ». En effet, ce sujet est sensible puisqu’un emballement de l’inflation pourrait conduire la Fed à resserrer prématurément sa politique monétaire et par ricochet impacter considérablement le mouvement de capitaux sur la planète, notamment en provenance des pays émergents vers les Etats-Unis. Selon Bank of America, la peur d’un durcissement monétaire (« taper tantrum »), l’inflation et les hausses d’impôt sont perçus comme des risques plus importants que la Covid 19 par les gestionnaires d’actifs.
Pour le moment, Jerome Powell rappelle toujours que les tensions inflationnistes seraient temporaires. La publication la semaine dernière des minutes de la Fed des 16 et 17 mars montre ainsi l’optimisme de la Banque centrale quant à une sortie rapide de la crise grâce aux bénéfices de la campagne vaccinale et au plan de stimulus supplémentaire, mais souligne que « l’économie reste loin des objectifs de long terme et que les perspectives à venir demeurent très incertaines », ce qui confirme que la politique monétaire devrait rester accommodante pour longtemps et qu’une quelconque réduction du rythme d’achats d’actifs n’est pas imminente. Les banquiers centraux américains ont noté qu’il faudra « un certain temps » avant qu’« un progrès significatif » soit accompli vers la réalisation des objectifs d’inflation et d’emploi. La hausse anticipée de l’inflation à court terme (dépassant 3% sur un an au deuxième trimestre) est considérée comme temporaire et la Réserve fédérale prévoit
toujours une baisse de l’inflation l’année prochaine. Concernant la hausse des rendements obligataires, elle reflèterait « l’amélioration des perspectives économiques, un certain raffermissement des anticipations d’inflation et les perspectives d’émissions accrues de titres de dettes souveraine ». La Fed se montre toutefois prête à réagir en cas de hausse excessive des anticipations d’inflation et de hausse « soutenue » des taux. Wait and see !